J'ai ramassé une pierre au bord du chemin. Je ne
J'ai ramassé une pierre au bord du chemin. Je ne sais pas pourquoi – j'ai entendu un bruit derrière moi – je ne t'ai pas vu arriver – je ne reviendrai pas sur mes pas – je n'oserai pas t'accompagner jusqu'à ta maison.
Les mots ne veulent pas aller à la rencontre de l'esprit. Ils ont perdu leur sens même. Ils gisent sur la grève. L'ombre – le vent – les nuages – les étoiles – hier – aujourd'hui – demain – une condition d'homme – un rêve d'enfant – un geste ébauché.
Sans fond – sans risque – sans joie.
Je me suis posé doucement sur le bras de la croix qui veille sur la tombe des miens. Leurs dépouilles m'entourent. Ils me parlent de mon absence – des jours sans fin, de la destinée humaine – de la veille au soir – du jour au lendemain – du silence des saisons – de la clarté des étoiles.
Quelque chose a dû se passer – un jour prochain – pour que je sois là, ce soir à les écouter – à écouter leur silence étourdissant – vertige existentiel au goût de remords.
Tristesse joyeuse d'une après-midi insondable – au jardin du souvenir. Plus rien ne bouge.
Plus rien ne remue.
Plus rien ne va – au-delà de l'horizon – au-delà du mot dit pour le plus vieux des enfants.
Une autre nuit – un autre jour – un autre arbre.
Je ne sais pas où j'ai pu poser quelque chose sur ce morceau de papier qui obscurcit mon horizon.
Je ne sais pas non plus, s'il est à dire quoi que ce soit de plus. Trier – ranger – recevoir.
Je n'ai plus d'oreilles. Je n'ai plus d'images.
Retourner en arrière, une seule fois. Rejoindre un souvenir. Rattraper. Revenir. Respirer à nouveau. Prendre à bras le corps.
Saisir – accompagner – retrouver. Il y a toujours à retrouver quelqu'un quelque part. Un père – une mère – un combattant – un ami – une femme – un espoir – un rêve. Quelque chose qui vient d'ailleurs – une impression – une fleur – un souffle – un esprit – une présence – un fantôme. J'aurais tant aimé être avec mon ami – un autre jour – une autre fois – dans un nouveau lieu. Je ne sais...