Le bruit du vent dans les feuilles – du coeur
Le bruit du vent dans les feuilles – du coeur dans la poitrine – un sein qui se soulève doucement – un corsage délicat sur une poitrine de soie – doucement le souffle de l'air dans le bleu de la brume – être avec – ressentir – toucher – effleurer – se commettre – enlacer – le doux vertige d'un horizon muet – il ne sait pas ce qui lui arrive.
Il n'a pas entendu le bruit de la source – ni le murmure du soleil au lever du jour.
Ce sentiment d'accompli – sérénité d'un soir – comme un espace nouveau dans un temps escompté.
Il y eut un soir, il y eut un matin... Quelque chose a éclos à l'horizon d'un autre temps – comme si elle avait pu surgir de la mer – telle Vénus, dans le plus simple appareil – sur la crête des vagues.
Dehors le printemps se cache encore au plus profond des arbres dans l'attente d'une renaissance gorgée de sève et de sucs odorants.
Le ciel est gris, recouvrant le soleil d'une chape ténébreuse – rien ne peut arriver – tout se tait – seulement le bruissement d'un crayon sur la feuille blanche éclairée d'ombres multicolores et de lignes entrelacées.
Déjà – comme si – on ne savait pas – ce que je dis – sans le savoir.
Ne pas écrire – rien dire – rien faire – sans bruit – sans voix – sans jeu.
Un jour – une nuit – le vent – la vie – la mort – l'espoir – l'amour – toi – et puis – une fois – encore une fois – peut-être...
Savoir – sentir – exister – vivre – respirer – l'air – le souffle – le vent.
Plus rien ne bouge – immobile – immaculé – immodeste – immature – inondable – immortel – aimable.
Je ne peux – ni ne veux – j'attends – je t'attends – mon amie – mon frère – ma soeur – ma mère – toi – moi – lui – un autre – une autre fois – autrement – autre chose – outrancier – ostensiblement – dilatoire – comme un rêve muet dont on ne se souvient plus – jusqu'à ce jour – bientôt.
Il est arrivé un jour quelque chose à quelqu'un sans qu'il ne puisse dire exactement de quoi il s'agissait. On aurait pu dire que cet accident ne survenait pas entièrement par hasard – si ce n'est le poids de la fatalité inexorable qui envahit chaque destinée.
Je ne parlerai pas du passé, pas plus que du présent, sinon pour en évoquer les circonvolutions anachroniques et substantielles qui entourent chaque évocation.
Je ne me souviens pas d'avoir été moi-même en quelque circonstances – pas plus qu'un autre – mais seulement un des divers personnages qui nous habitent tour à tour et vous empêchent toute reconnaissance ultérieure. J'aurais tant voulu pouvoir me raccrocher à cette douce incertitude qui accompagne tout homme sans mémoire au long d'une existence hasardeuse où s'entrecroisent l'anodin et le perpétuel.
Chaque événement est recouvert – raccourci – restitué – respecté – restauré.
Et c'est alors que le sommeil gagne le groupe et envahit l'espace comme la brume recouvre l'horizon et colore l'avenir de son uniformité. Jusque là tout va bien et rien ne peut surgir d'un passé trop contraint et encore à inventer. J'y suis presque. Encore une ligne – une seule ligne – quelque chose de plus ou de moins – un geste d'espérance – un morceau d'aventure – un seul geste – un baiser... un dernier mot.