Encore un jour puis un autre – encore une fois –

Encore un jour puis un autre – encore une fois – une seule fois – avant d'arriver – de parvenir – d'aboutir – de revenir – de traverser.
Dehors la nuit est tombée – comme chaque soir – chaque jour.
La lumière s'est éteinte – et pourtant ailleurs le jour se lève – sur un autre jour – sur une autre destinée.
Tout meurt et tout revit. Tout est là à même le vide – sans but – sans raison – sans nuage.
Il n'a pas à être, celui qui est déjà là.
Il n'a pas à se dire – l'homme silencieux.
Vivre dans l'instant ce qui ne doit pas, ne peut pas arriver – et enfin se souvenir de ce qui arrivera.
Goûter l'air – le savourer – l'absorber comme un breuvage teinté d'absolu. S'emplir de mots – les mordre à pleines dents  – recevoir ce que personne ne m'a jamais donné – comme un souvenir d'enfant – un éclat de lumière.
Un court instant, j'ai craint de ne pas arriver jusqu'ici et de ne pas pouvoir retrouver ce moment de communion avec moi-même et mes partenaires – comme si un fil pouvait être rompu entre nous – dans l'ordre de l'absence et du destin. Et puis le miracle a eu lieu encore une fois – une autre fois – pour combien de semaines – combien de mois – combien d'années.
Fuite du temps. Absolu spatial et intemporel. Sentiment d'humanité éclatée et sans cesse à reconstruire.
D'un coup mes absents se bousculaient à ma porte – dedans – dehors – en moi – ailleurs et partout. Leurs mots ressemblent à des cris – leurs noms au bruit des vagues. Je pourrais vous nommer tous – un à un – vous cajoler sous les ors de l'écriture.
Peu à peu quelque chose s'est reconstruit à l'image d'un souvenir ressuscité – d'un goût retrouvé – d'un ami revenu après un long voyage – de l'autre côté du monde.
Entre tout dire et rien dire, si peu d'espace, si peu de temps – Entre vivre et mourir – très peu de temps – sauf peut-être encore le son d'une cloche dans le lointain – le bruit du vent – le goût de la cerise et le plaisir d'une amitié retrouvée.
J'ai encore oublié de vous parler des étoiles – de la neige – de la couleur du ciel et de la mer – du bruit des vagues, de mes rêves – des vôtres aussi – et du plaisir de partager cet instant.

Adami